Ils étudient le design expérimental à l’Université des Beaux-Arts de Hambourg. Lorsque leur professeur Jesko Fezer leur a présenté le semestre dernier la demande du Cercle des Amis du Mémorial de Neuengamme (« Freundeskreis KZ-Gedenkstätte Neuengamme »), un groupe d’étudiants intéressés pour des raisons et des motivations différentes s’est tout de suite formé. Le groupe interdisciplinaire s’est renforcé au cours de leurs dernières rencontres. Actuellement, les étudiants élaborent des propositions pour le « lieu de mémoire partagée » des familles d’anciens déportés du camp de Neuengamme. Ci-dessous, les étudiants expliquent pourquoi ils veulent participer à la réalisation de ce lieu.
Anna:
« La collaboration pleine de confiance avec le Cercle des Amis du Mémorial me touche beaucoup. Je suis honorée de participer à la réalisation de ce lieu de mémoire partagée antifasciste. Je prends part à ce projet d’étude car je veux tester et mettre en pratique la totalité de mes connaissances en design dans des domaines politiques ambitieux et socialement importants ».
Charlotte :
« J’ai fait un volontariat d’un an en Israël, à Jérusalem. Pendant cette année-là, je me suis beaucoup intéressée à la perspective juive relative au nazisme et à la Shoah. Une fois rentrée en Allemagne, j’ai remarqué que mon intérêt pour ce thème était passé à l’arrière-plan. Pour moi, pouvoir par le biais du lieu de mémoire partagée, être confrontée de manière active et intensive à l’histoire locale du nazisme est très instructif et important. Ainsi, je prends conscience du grand nombre de lieux à Hambourg ayant un passé nazi, lieux qui cependant sont souvent invisibles au quotidien. Avec le travail sur l’histoire du camp de Neuengamme, ma perspective jusqu’à présent essentiellement juive sur le nazisme s’élargit, laissant entendre de nombreuses voix importantes (et éventuellement marginalisées). Les dimensions du nazisme se révèlent à moi à présent dans leur ampleur. »
David:
« D’une perspective antifasciste, je me penche depuis longtemps – aussi en relation avec l’histoire de ma famille – sur le sujet de la Shoah et des atrocités du nazisme, mais aussi sur les mouvements néofascistes et aux autres mouvements fascistes jusqu’à nos jours. Très tôt, mes parents m’ont transmis la conviction que quelque chose comme Auschwitz ne doit jamais se répéter. C’est pourquoi il est essentiel pour moi de parvenir à une culture mémorielle et commémorative qui encourage de manière active la transmission de connaissances à la génération suivante et qui non seulement éveille l’intérêt d’un débat avec l’histoire, mais qui, j’espère, crée aussi une conscience quelque peu émancipatoire et une responsabilité de la société. Ainsi il sera possible un jour de grandir dans une société sans pensées et mécanismes antisémites, racistes, sexistes ou autres ».
Ben:
« Pour moi, participer à la réalisation de nouvelles formes de mémoire est une tâche précieuse et importante. Je trouve la perspective et la préoccupation de ce groupe très intéressantes pour le projet, mais aussi pour moi-même »
Hannes:
« J’étudie le design pour me confronter à des questions de société pertinentes. La mémoire du régime nazi et le débat promu sur le lieu de mémoire partagée ne sont pas seulement importants sur le plan de la société en général. Dans ma famille aussi, qui pendant le régime nazi était du côté des bourreaux, et dans mon entourage, les conséquences indirectes de la guerre sont présentes de manière subtile. Alors que les témoins disparaissent, comment pouvons-nous assurer que nous n’oublierons pas ? »
Nick:
« Je sens la responsabilité de ne pas oublier les horreurs du nazisme et de transmettre cette responsabilité à la génération d’aujourd’hui et à celles de demain. Le fait que ces pensées sont menacées par des mouvements fascistes comme l’AfD (le parti « Alternative pour l’Allemagne ») me pousse à agir. Le projet autour du lieu de mémoire partagée est pour moi une possibilité de discuter avec des descendants des victimes du national-socialisme et de me recueillir et de commémorer avec eux. Ensemble, nous réalisons un lieu pour l’humanité. »
Paula:
« Les crimes du nazisme et les victimes ne doivent pas être oubliés. C’est notre devoir de lutter contre l’oubli et d’en transmettre la responsabilité aux prochaines générations. La possibilité de créer un lieu où l’histoire sera racontée, où le deuil et la colère auront leur place, mais qui sera aussi un lieu de rencontre est un projet essentiel dans le combat contre l’oubli. »
Tina:
« Pendant longtemps, j’ai cru qu’il existait dans la société une culture mémorielle. Cependant, quand j’ai été confrontée à des lieux dont j’ignorais le passé nazi alors que je passais devant tous les jours, j’ai dû revoir cette idée. Le souvenir peut-il être un processus quotidien ? J’ai trouvé les premières rencontres avec le groupe de travail du Cercle des Amis du Mémorial particulièrement intéressantes et à mes yeux, le débat est indispensable aussi en raison de la transmission future quand il n’y aura plus de témoins. »
Traduit par Christine Eckel